Monday, June 11, 2007

Manifs – Le mouvement se renforce

La tension est montée d’un cran, samedi, lorsque la manifestation quotidienne contre la junte s’est déplacée hors de Sanam Luang vers les bureaux du CNS. La police a pris soin d’éviter tout débordement même si un ancien sénateur a failli se faire tabasser. Cela dit, sans l’argent de Thaksin, la montée en puissance du mouvement anti-coup pourrait bien de ne pas durer.

Les manifestations contre la junte, relancées sur un rythme quotidien il y a plus de 10 jours à la suite du verdict de la Cour Constitutionnelle, semblent prendre de l’ampleur. Le désormais classique bandeau jaune sur le front et un drapeau à la main disant tous deux "la junte dehors !", 10 000 personnes s’étaient réunies samedi soir à Sanam Luang pour exiger le départ des militaires et demander le retour de la démocratie,… et aussi de Thaksin.


La manif s’invite chez les militairesLa soirée a commencé sur une ambiance plutôt festive (voir notre encadré), mais un peu après 22h, après avoir copieusement remonté les esprits, les organisateurs de la manifestation ont décidé qu’il était temps d’aller demander des comptes à la junte. Ils ont alors invité leur auditoire à se rendre devant le quartier général de l’armée, où se trouvent les bureaux du Conseil National de Sécurité (CNS), pour donner de la voix. Cela malgré l’interdiction des autorités de sortir du périmètre de Sanam Luang. Environ 1 500 policiers avaient été dispatchés autour de l’esplanade royale pour assurer la sécurité. Mais lorsque la foule a commencé à ouvrir les barrières qui encerclaient le rassemblement, les forces de police n’ont pu contenir le mouvement. D’autant qu’elles avaient pour consigne d’éviter de provoquer des bousculades pouvant déclencher des violences. Un officier de police expliquera d’ailleurs à la télévision vers 22h30 que les autorités voulaient éviter autant que possible de faire intervenir l’armée : "Nous voulons éviter de montrer des uniformes militaire afin de ne pas provoquer les manifestants affirmera-t-il sur la chaîne TITV. Ainsi, les manifestants n'ont pas mis longtemps pour parcourir les 2,5 kilomètres qui séparent l’esplanade royale du QG de l’armée situé sur l’avenue Ratchadamnoen.


Policiers prêts mais détendusPeu après 23 heures, devant le siège de l’UNESCAP, à quelques centaines de mètres des bureaux du CNS, des camions de pompiers lanceurs d’eau et une poignée de militaires s’organisaient pour être prêts à intervenir en cas de débordement. Au même moment, devant le QG de l’Armée, un barrage de policiers alignés en double rangée et seulement armés de bâtons et de boucliers interdisait l’entrée. Face à eux, ceux qui l’an dernier essuyaient les slogans accusant leur leader, Thaksin Shinawatra, de multiples entorses aux valeurs démocratiques, exigeaient haut et fort la restauration de celles-ci sous les fenêtres d’une junte indifférente. Cela tout en rappelant les abus de pouvoir, cas de corruption et autres méfaits attribués à plusieurs personnalités du camp des anti-Thaksin. Pour autant, si l’on pouvait sentir davantage d’agressivité que lors des manifestations de 2006, il eut été difficile de croire que les manifestants avaient prévu une quelconque intrusion dans le bastion de l’armée. Femmes et personnes âgées étaient tranquillement installées dans l’herbe à deux mètres des boucliers de policiers alertes mais souriants, lesquels prendront même soin de remettre chacun à son tour leur bouteille d’eau vide à un chiffonnier venu faire la tournée du barrage pour grossir sa collection de plastique.

Chasse musclée aux indésirablesMais les choses se sont gâtées un peu après 23h30 lorsque Kraisak Choonhawan, farouche opposant au régime Thaksin, est venu s’aventurer prêt du rassemblement, en observateur, a-t-il déclaré. L’ancien Sénateur, fils de feu Chatchai, Premier ministre renversé par les militaires en 1991, comme Thaksin pour corruption abusive, venait juste de quitter le groupe lorsqu’il a été sommé de rentrer chez lui par un homme proche des orateurs. Et, tandis qu’il tentait d’expliquer sa présence, un groupe de jeunes l’a aussitôt poursuivi, cherchant à l’empoigner et l’obligeant à trouver refuge auprès du cordon de policiers en faction près de l’UNESCAP. Il faut dire que Kraisak avait fait l’objet de sévères critiques plus tôt dans la soirée, peu substantielles selon lui. Emmené par la police, il dénoncera aussitôt l’incitation à la violence faite dans ces manifestations. Thaksin Shinawatra, soupçonné de financer ces manifestations, démentait hier toute implication. Quelques heures plus tard la commission anti-corruption gelait ses avoirs, soit un total de 52,9 milliards de bahts. Le Chef de la junte, le Général Sonthi Boonyaratkalin indiquait quant à lui dimanche qu’il ne comptait pas démissionner de son poste de Président du Conseil National de Sécurité. Il a par ailleurs estimé que le mouvement de manifestation anti-militaire ne constituait pas pour l’heure une menace suffisante pour déclarer l’état d’urgence sur Bangkok.

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